TRENTE-TROIS MONSTRES SUIVI DE (MARINA TSVETAEVA) : LETTRE À L´AMAZONE ZINOVIEVA-ANNIBAL LYDIA

"Trente-trois monstres fut le premier ouvrage en Russie à mettre en scène ouvertement l´amour de deux femmes l´une pour l´autre. Il provoqua un tel scandale à sa parution en 1906 que la totalité de la diffusion fut arrêtée par la censure, avant que l´interdiction ne soit levée en mars 1907, six mois avant le décès de Lydia Zinovieva-Annibal. Premier récit lesbien de la littérature russe, Trente-trois monstres se présente comme les fragments du journal d´une jeune femme qui a été séduite, la veille de ses noces, par une brillante et célèbre actrice, Vera. Vera, amoureuse, subjuguée par la beauté de cette jeune femme, est vite soumise à la tentation d´exhiber, comme dans un sacrifice inéluctable, celle qu´elle aime à trente-trois peintres qui feront chacun le portrait de celle-ci, trente-trois monstres assoiffés de beauté et de possession. La célèbre traductrice Luba Jurgenson rend toute sa force et sa beauté à ce texte précurseur et fondamental. Trente-trois monstres est suivi de la Lettre à l´Amazone (véritable titre de Mon frère féminin), texte écrit en français par Marina Tsvetaeva. La poétesse russe avait été subjuguée par les Pensées d´une amazone (1920) de Natalie Clifford Barney (1876-1972), et décida en 1932 de lui écrire une lettre. «J´ai lu votre livre. Vous m´êtes proche comme toutes les femmes qui écrivent. Ne vous offusquez pas de ce ""toutes"", toutes n´écrivent pas : écrivent celles entre toutes. Donc, vous m´êtes proche comme tout être unique et, surtout, comme tout être unique féminin.» Cette lettre resta dans les cahiers de Tsvetaeva et fut publiée longtemps après sa mort : en 1979. Avec sa maîtrise incomparable de la langue française, Marina Tsvetaeva a écrit un des plus beaux textes sur l´amour lesbien , elle en analyse les tourments et s´attache, en particulier, à définir les manques et les inquiétudes de deux femmes qui s´aiment sans qu´il leur soit possible d´avoir un enfant. Cette parution fait écho à celle, également chez Ginkgo, de la grande biographie de Marina Tsvetaeva par Viktoria Schweitzer. Les autrices : Lydia Zinovieva-Annibal est née le 1er mars 1866 d´une famille noble. Elle grandit à Saint-Pétersbourg, étudie en Allemagne, voyage en Europe. Elle tient avec son second mari, le poète et écrivain Viatcheslav Ivanov, dans leur appartement de Saint-Pétersbourg un salon littéraire qu´on appellera « la Tour ». Dans ce salon se côtoient les poètes Anna Akhmatova, Goumilev, Blok et se tiennent des débats philosophiques et mystiques. Lydia est l´auteur de plusieurs récits et pièces de théâtre, et surtout en 1907 de «Trente-trois monstres». Elle meurt de la scarlatine six mois après la parution de ce texte féministe précurseur et fondamental. Marina Tsvetaeva est avec Anna Akhmatova la grande poétesse du XXe siècle russe. Née en 1892, elle publie en 1910 son premier recueil de poésie, immédiatement reconnu dans les cercles littéraires, et épouse peu après le poète Sergueï Efron, l´homme autour duquel tournera tout le reste de sa vie. Mais Tsvetaeva eut également des relations passionnées avec de nombreux amants et amantes, parmi lesquels principalement les poètes Ossip Mandelstam et Sofia Parnok. Elle émigre après la Révolution, en 1922, d´abord à Prague puis en France où elle vécut quatorze ans. En 1939, elle se laisse persuader par son mari de rentrer à Moscou. Lui et leur fille sont arrêtés et, alors que l´armée allemande s´enfonce toujours plus profondément en Russie, Tsvetaeva et son fils sont évacués vers Elabouga où le 31 août 1941, Tsvetaeva se suicide et entre dans la légende du XXe siècle."